Aujourd’hui, la mode est au selfie. Ici où là, fleurissent les ego comme les cerisiers en fleurs. Paroxysme de l’égocentrisme, ils obligent les narcisses à s’équiper de perches en attendant que l’évolution naturelle comble enfin cette tare bien pénible de bras trop courts.
On en voit parfois même qui reculent tout en tendant désespérément les bras, espérant peut-être arriver par quelque miracle à disjoindre leurs jambes de ce bras ridiculement petit et gagner les quelques centimètres qui éviteront là un nez protubérant ou ici un grain de peau disgracieux. Il paraît même que certains en meurent…
Cette mode au selfie m’est souvent incompréhensible quand elle ne m’est pas, avouons-le, pénible. Certains en effet, non contents de se contorsionner dans des pauses souvent ridicules, vous kidnappent de leur bras libre en quête d’un alibi – devrais-je dire d’un otage. Le selfie est décidément à l’égoïsme, ce que la photographie est naturellement à l’altruisme…
Et si je dois bien concéder que je m’adonne en de rares occasions à l’autoportrait, je n’en retire jamais autant de plaisir que saisir l’autre, de capturer son regard, son sourire, ses joies ou ses tristesses.
Et parfois, comme ce jour-là, se crée un jeu : celui de l’égoportrait croisé.
Elle avait un argentique, moi un numérique. Nous profitions d’une belle fin d’après-midi et soudain, sans réfléchir, sans préméditation, nous étions face à face, l’oeil dans le viseur. Ensemble, nous avons déclenché et mon coeur immédiatement fut emporté par les vers de Bashô :
Le Chêne
Sa mine indifférente
Devant les cerisiers fleuris
Matsuo Bashô
Coïncidence : ce matin, c’est-à-dire le lendemain de la publication originelle de cet article, j’ai découvert que La Tête au Carré – émission scientifique de France Inter – avait consacré celle du jeudi 15 octobre au selfie. Je vous invite à la découvrir en podcast sur le site de France Inter.
J’adhère complétement à ton propos sur les selfies, cette mode ridicule de l’auto-mise en avant, cette ‘starisation’ éphémère via les réseaux sociaux…
Si certains peuvent s’en amuser et ne profiter de cette mode pour conserver des souvenirs d’un moment convivial, certains, avec une moue provocatrice et séductrice, se prennent pathétiquement au sérieux… oubliant toute notion d’humilité et de mérite…génération du paraître pour réussir…
Mais attention, avec cette perche, comme prolongement du bras…il paraît qu’il y a eu un mort à cause de la foudre… Comme quoi on paye parfois lourdement l’égo-coup de foudre!!
Merci de cette nouvelle très belle publication… Mais il faut scanner la photo miroir argentique…!
Merci de ton passage, Sabine, qui me permet de constater que le selfie c’est encore moins ton truc que moi…
Quant à la photo miroir argentique, la pellicule étant encore dans l’appareil, il faudra attendre un peu !
Bises
Une petite mise à jour donc… Avec la photo miroir.